Jan 102014
 

Au prétexte de la lutte contre les réseaux d’immigration et les « mariages blancs », la suspicion est généralisée à l’encontre des couples franco-étrangers.

Par Louis Fraysse

« Je savais que ce serait compliqué, mais je n’imaginais pas un instant que nous nous ferions traiter comme des moins que rien, cela m’a mis une vraie claque. » Pour Camille*, 26 ans, et son époux, comme pour de nombreux couples franco-étrangers, vivre leur amour en France n’a rien d’une formalité, même une fois mariés.

 

Il y a quatre ans, alors étudiante à Nancy, la jeune femme rencontre Mehmet*, étudiant turc. Le couple vit deux années à Istanbul puis, en 2011, ils célèbrent leur mariage dans la cité stambouliote, solution choisie pour continuer à vivre ensemble. Après la constitution d’un premier dossier, le mariage est transcrit sur les registres de l’état civil du consulat français. Les jeunes mariés décident alors de revenir s’installer en France. C’est le début d’un processus long et complexe.Détenteur d’un visa de long séjour, Mehmet est reçu à son arrivée en France par l’OFII, l’Office français de l’immigration et de l’intégration, créé en 2009. Après avoir passé avec succès tests de français et examens médicaux, il reçoit un dossier à compléter de la part de la préfecture de Paris, dans le but de renouveler sa carte de séjour. Cette dernière, payante, est renouvelable chaque année pendant trois ans, avant que le demandeur puisse demander une carte de résident de dix ans. La liste d’éléments à fournir, qui varie selon les préfectures, est très détaillée : passeport, visa, justificatif de domicile, photographies d’identité, attestations sur l’honneur de non-polygamie, livret de famille, carte d’identité du conjoint… et surtout justificatifs récents de communauté de vie – déclaration commune de revenus, bail d’habitation, quittance EDF, relevés bancaires ou correspondance personnelle. Certaines préfectures ne fixent d’ailleurs pas de limites au nombre de documents à apporter.

« Ne pas abandonner »

Le dossier est complet mais, deux fois de suite, le renouvellement du titre de séjour est refusé à Mehmet. La première, parce que Camille n’est pas présente lors de l’entretien – elle travaille et avait pourtant attesté sur l’honneur vivre avec Mehmet. La seconde, six mois plus tard, parce que les photographies fournies ne sont plus assez ressemblantes : Mehmet a changé de coupe de cheveux. Alors qu’un troisième rendez-vous est pris, le couple est convoqué au commissariat pour une audition, afin de vérifier la réalité du mariage. Les deux époux sont interrogés séparément.

« J’ai dû donner le prénom de ses parents, rappeler notre date de mariage et les circonstances de notre rencontre, donner des noms d’amis communs… Les policiers m’ont semblé désabusés, ils nous ont expliqué qu’il était de plus en plus dur de vivre en couple mixte aujourd’hui en France », raconte Camille. Puis vient la troisième convocation à la préfecture. « Nous étions une cinquantaine, tous convoqués à la même heure, presque tous debout, dans une salle où il faisait très chaud. Et lors de l’entretien, une fois de plus, quelque chose n’allait pas : nous n’avions pas réuni assez de preuves de vie commune… L’agent ne comprenait pas qu’un jeune couple marié n’ait pas de compte en commun. Une fois de plus, il nous fallait nous justifier sur notre mode de vie. » Lire la suite sur le site de Réforme

à lire également sur le site de réforme, le témoignage de Samia et Pierre.

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